La négo selon Ségo

On peut trouver sur le blog d’Urvoas les lettres que Ségo a envoyées à Martine, Bertrand et Benoît pour proposition de synthèse. Ces lettres reprennent in extenso son document de travail et se différencient par l’analyse de certains points propres à chaque motion. Petit résumé critique.

Le document de travail:

1) Résoudre la crise: Diagnostic par les fédés du PS, solution élaborée non pas par les technocrates et les gouvernements, mais par un forum « mouvement social, syndicats, représentants des services publics, salariés en lutte, entrepreneurs, associations, universitaires, altermondialistes, consommateurs, petits épargnants » à dimension européenne (pipeau péruvien de magnitude 8 sur l’échelle de Chirac).

2) Cinq orientations pour le socialisme du 21è siècle: rééquilibrer capital/travail (un nouvel ordre économique et social juste), Etat préventif et nouveau modèle de croissance, écologie, plein de démocratie ce qui inclut apparemment la diversité et l’égalité réelle, « Réorienter l’Europe pour la relancer » (ne veut rien dire – veut ne rien dire).

3) Rénover le PS: Respect du vote des militants, adhésions 20 euros (parti de masse). Le fric descend aux fédés (Collomb, Guérini, Frêche?) et on crée une université populaire dans chaque région, nouveau militantisme plus sur le terrain (est-ce le rôle du PS ou des assoces? La double appartenance est une tradition du PS, le PS se concentrant sur le débat politique…).

4) Fédérer la gauche: contrat de gouvernement avec la gauche dans le cadre si possible d’une fédération, qui associe les militants. « C’est à partir de cette stratégie que les socialistes ont vocation à s’adresser seulement ensuite à toutes les forces susceptibles de se reconnaître dans le projet socialiste pour battre la droite. » (coucou Modem! Aux dernières nouvelles, la question ne se poserait que dans l’entre-deux tours de 2012 et n’a pas à être tranchée avant. Hamon rétorque que c’est pas la peine de faire un programme très à gauche pour proposer à la fin Matignon à Bayrou – Décision certainement très collective, ajouterai-je)

Elle développe pour chaque Motion:

Martine:

1) Fiscalité: Fusion CSG et impôt sur le revenu, réduction des niches et suppression du bouclier, retenue à la source et transparence fiscale et vérité des taux d’imposition (il y’a deux manières de faire la retenue à la source: faire calculer par l’employeur le quotient familial et toutes les déductions fiscales (adhésion au PS, cours pour le gamin… bonjour la vie privée…) ou en supprimant tout ce système et en cessant de mobiliser des incitations fiscales. La patte de Piketty est très certainement là, mais je ne suis pas absolument certain que tout le monde chez Ségo ait compris ça dans la rédaction apparemment inoffensive du truc)

2) Pouvoir d’achat: augmenter les salaires. Le SMIC bien sûr (tiens? Elle y croit à nouveau?). Puis elle reprend les propositions de Martine empruntées à DSK: incitation à la négo par les cotisations sociales, changement du calcul des cotisations sociales, conférence salariale tripartite annuelle. Taxe superprofits compagnies pétrolières.

3) Le rôle de l’Etat : Un Etat stratège, ce qui est censé correspondre avec l’Etat qui assure la neutralité entre les citoyens et qui descend au niveau de l’individu dans la motion D.

4) L’immigration : Ne pas complètement ouvrir, mais combattre l’ostracisme par le co-développement et les régularisations sur critères clairs d’intégration.

5) Les retraites : pas d’allongement de l’activité, renforcement du FRR, mise en place du système notionnel « à cotisations égales, retraites égales »,

Bertrand :

1) Faire ce qu’on a dit : Bien sûr ! Et ça n’empêche pas d’être à gauche à donf ! Sur l’interdiction des licenciements, ça ne s’applique qu’aux licenciements boursiers des entreprises qui font des bénéfices et qui ont reçu des aides publiques ; elles devront alors rembourser ces aides (donc en fait, l’interdiction des licenciements n’a rien à voir avec une interdiction des licenciements).

2) Europe et sociale-démocratie : travailler plus avec toutes les forces progressistes européennes et en particulier avec le PSE. Sociale-démocratie = années 60, papy ! Vive le nouveau socialisme du 21è siècle, fondé sur l’Etat préventif et d’ailleurs on pense pareil (merci DSK).

3) Le Parti : Love, love, love. Et pour l’aimer plus fort encore, aimons-le plus nombreux en baissant les cotises de ceux qui ont pas les moyens (de payer 30 euros tarif de base, et de rien payer quand la section fait un geste ?), en faisant payer plus les bourges du PS pour compenser. Comme ça, on rassemble toute la gauche, et on s’adresse ensuite à « ceux qui sont susceptibles de se reconnaître dans notre projet » (genre… qui ?). Long développement sur : le parti doit changer parce que le monde change, pas parce qu’il aurait été géré comme une bouse, bien au contraire (à quel nom, la dédicace ?)

Benoît :

1) Le renouvellement : wesh mon frère, t’as vu on est comme ouat ! On est des jeunes et issus de la diversité toussa !

2) A gôche : Camarade , nous te rejoignons dans ton juste combat ! A tes côtés pendant la crise, nous avons vilipendé l’hydre capitaliste ! Tu vas voir on va les niquer les puissances d’argent !

3) « Sur « le refus d’un contrat de gouvernement avec le Modem » : Euuh.. En tout cas on a pas écrit qu’on en proposerait pas aux partis de gauche… (dans le texte : « Nous n’avons jamais prôné … un « renversement d’alliances » »)

Au final, on ne peut qu’être surpris que soient rendues publiques des lettres de négociation qui ne négocient rien. Après avoir ressorti sa candidature du frigidaire au grand dam de ses co-signataires de motion, Ségolène Royal se contente ici de résumer les axes forts de son texte au bénéficie sans doute de ceux de ses interlocuteurs qui n’auraient pas encore eu le temps de le lire en entier.

Elle prend ensuite grand soin de leur expliquer que sur chaque sujet, ils sont en fait d’accord avec elle et que donc il n’y a pas d’obstacle à l’union! Au point que l’on finit par se demander en quoi elle peut incarner la rénovation si elle est d’accord sur tout avec tout le monde…

Il n’y a donc aucun début de concession, y compris sur des sujets fondamentaux comme sur la démocratie interne au parti: c’est bien beau d’offrir aux militants la possibilité de s’exprimer, mais jamais rien sur leur droit de décider, de trancher les propositions des conventions par un vote, de voter sur la candidature à la présidentielle. La direction tirera – en toute impartialité – le suc de ce qu’elle a entendu pour se prononcer sur ces sujets. Ce n’est ni une négociation sérieuse, ni même un simulacre convainquant. C’est une position d’autorité à partir d’un socle étroit d’un quart des voix. La négo selon Sego, c’est le tout à l’égo.

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